Un enchanteur du Septentrion : Dominique Joye

La tentation est grande d'associer notre facteur Joye au facteur Cheval. Aussi devrais-je m'en abstenir, mais bon ! puisque lui-même n'y répugne pas. Comme ça, ça évite de plancher sur la question de savoir si son art est naïf, populaire ou brut. Disons qu'il est dans cette sphère d'appartenance, pour ceux que ces appellations renseignent précieusement. Et puis d'abord, en quoi le facteur Joye est-il notre facteur Joye ? Ça, c'est pour la petite histoire : tout bonnement parce que Dominique Joye est depuis fort longtemps, peut-être depuis toujours, le facteur de Lompret. Et le facteur Joye, ça fait des lustres que sa tournée terminée, il fait " broquante ", comme on dit à Lille, de pelles, de pioches, de pinces à bûches, de serpettes, etc. Ah ! oui, il écrit des poèmes aussi. Ces pelles, pioches, pinces à bûches et autres serpettes, - tout comme le facteur Cheval charroyait galets et fragments de rochers -, il les récupère à des fins de sculptures qui vont peu à peu proliférer dans l'autre vie qu'il leur procure.

En effet, tous ces outils d'antan, la pioche surtout ! lui servent à refaçonner des personnages, moitié outils donc, et moitié argile, enduits de peinture céramique et de cire afin de les patiner en objets à peu près finis, mais pas trop, juste ce qu'il faut, car il faut aussi que transparaisse la matière première. Le résultat, ce sont des personnages de contes, hauts en couleurs mais aériens, dont l'équilibre semble défier les lois de la pesanteur. Équilibre instable ? Oui, mais équilibre instable aussi solidement arrimé que contre vents et marées notre bon facteur l'est sur sa bicyclette à la lourde sacoche de courrier. Il y a encore toutes sortes d'animaux, l'occasion d'étonnants arrêts sur images, en ce cas il n'est pas rare que ces sujets, dans leur langage à eux, nous fassent voir comme en arrière-plan, c'est sensible, regardez vous-même : le jardin d'enfance que nous avons au fond de nous ! La réfection du monde est dans ce fin décalage qu'il faut pour que ça tombe doublement sous le sens et sous le charme.

 

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